Juhan Jaik

JUHAN JAIK (1899-1948) naquit à Sänna, dans la province de Võrumaa (sud-est de l’Estonie) où il fit ses études secondaires. Arrêté à l’âge de seize ans pour son appartenance à une organisation indépendantiste clandestine, il subit deux ans de déportation en Russie. De retour en Estonie, il reprit ses études à Tallinn en suivant des cours du soir, puis prit part à la guerre d’indépendance comme engagé volontaire.

Ses poèmes en langue de Võru commencèrent à paraître dans le journal Päevaleht en 1921, avant d’être publiés en 1924 dans le recueil La Cloche de l’église de Rõuge. La même année parut le premier volume des Contes de Võrumaa, avec des illustrations d’Eduard Viiralt. Tout en travaillant au sein de la rédaction de divers journaux (Päevaleht, Postimees), puis comme conseiller au ministère de l’Éducation, Juhan Jaik fit régulièrement paraître d’autres recueils de contes et nouvelles (Chameaux et joueurs de trombone, 1928 ; La Pierre magique, 1931 ; La Pelisse du grand-père, 1933 ; Histoires de fantômes, 1936, etc). Il publia également plusieurs recueils de contes pour enfants, et du théâtre.

Les histoires de Juhan Jaik ont en commun deux caractéristiques frappantes. L’une tient aux sujets, qui entremêlent fantastique et vie quotidienne dans un univers peuplé d’esprits, de fantômes, de revenants, d’elfes, d’anges et de démons aussi bien que de paysans, d’enfants, de vieillards et de jeunes filles. Les intérêts des uns et des autres ne concordent pas toujours et les conflits ne sont pas rares, mais la bienveillance et la coopération non plus. La seconde caractéristique, omniprésente, est le pays de Võrumaa. Que ce soit le lieu où se passent les histoires racontées ou bien la langue que parlent les personnages (parfois aussi, plus discrètement, la langue du narrateur lui-même) il y a là une présence extrêmement pénétrante, comparable peut-être à la Provence dans les contes d’Alphonse Daudet (avec qui le rapprochement mériterait d’ailleurs d’être approfondi).

Juhan Jaik quitta l’Estonie en 1944 avec sa famille, tout d’abord pour l’Allemagne, puis l’année suivante pour la Suède, via la France. Il mourut à Stockholm le 10 décembre 1948, après avoir vu la parution d’un dernier recueil, La Vie dorée (1946).

Jean Pascal Ollivry