Traduits de l’estonien par Antoine Chalvin
Sinu kindlaid südamelööke
olen tundnud rinnus
juba enne sündimist.
Ei ole piina,
ega pääsu piinast.
Sinu hääl kõrvetab mu kõris,
sinu unenäod tungivad mu silmakoopaisse.
Sinu suu sulgub
mu nägemuste ümber.
Olla võti, olla võti
su lootuste lukuaugus!
Lasta välja linnud
ja tuulutada nutmata ööd!
Sinu jalgade värinat
ei ole enam
väljaspool
minu jalgu.
Mere selgroog
murdub
vastu kederluid.
Öö rebeneb mööda seljaõmblust
ja kustutab tagantkätt tähed.
Ton cœur qui bat, plein d’assurance,
je l’ai senti dans ma poitrine
bien avant de venir au monde.
Point de souffrance
et point d’issue à la souffrance.
Ta voix brûle ma gorge,
Tes rêves pénètrent mes orbites.
Ta bouche se referme
autour de mes visions.
Être une clé, être une clé
dans la serrure de tes espoirs !
Libérer les oiseaux
et aérer les nuits sans larmes !
Le tremblement de tes jambes
n’existe plus
en dehors
des miennes.
La colonne vertébrale de la mer
se brise
contre les chevilles.
La nuit se découd dans le dos
et éteint les étoiles derrière elle.
su vari — eksides mu meelte häkku
seal erutas mu morni lemmiklooma —
su lumiseile tuharaile jooma
taas saatsin oma sametmusta täkku
õrn patsutus — ja kadund oruräkku
ta oligi: kõik rajad viivad rooma…
ja toovad tagasi — su silmad pooma
mind jäävad lõputusse unenäkku
su mahlust oma luulehobu joota
ja ise janus olla — oma sappi
vaid rüübata ja kasta sulge verre
mis imetud su huultest! — aina loota
mu saatus on — sind aina hüüdes appi
end uputada üksildusemerre
1981
ton ombre — errant dans ma tête brumeuse
a excité mon cheval au cœur lourd —
et mon étalon d’un noir de velours
est venu boire à tes fesses neigeuses
une caresse — il part dans le vallon
touffu — tous les chemins mènent à rome…
et reviennent — tes yeux me pendent comme
à un cauchemar infiniment long
j’abreuve mon pégase à tes fluides
mais j’ai soif et je bois mon fiel amer
en trempant ma plume dans le sang tiède
que j’ai sucé à tes lèvres humides !
l’espoir au cœur je me noie dans la mer
de la solitude — implorant ton aide
À toi
qui appartiens à la nuit de novembre
comme le cavalier à la selle
comme l’épée au sang
je veux aujourd’hui te jurer
une infidélité éternelle
D’un pas de maître d’armes
tu me poursuis
de vie en vie
tu rends sensées et ridicules
mes plus audacieuses folies
tu veilles en sage-femme exercée
sur mes métamorphoses
Et si un jour le temps doit venir
de la vengeance
je jure
de renoncer devant toi
à la mort la plus belle
KARLOVA
L’avenir n’est rien d’autre
que des milliers d’instants embarrassants.
Fierté des nuits de ma jeunesse,
avec ton cœur qui frappe comme un fou,
prends garde à toi dans la lumière tendre !
Regarde : une maison ivre
a jeté son ombre sucrée, —
la ville de mon enfance me poursuit encore
dans les impasses sombres.
Les étroites fenêtres ont jusqu’au matin
un visage froissé par les fracas du soir.
Fierté des nuits de ma jeunesse,
crois-moi,
sous les pavés, les jours
sont diablement longs !