Le porteur de flambeau

    L’homme avait froid. Le drap qui le recouvrait était trop mince pour lui tenir chaud. Il sentait au-dessous de lui une surface froide et dure. Il se recroquevilla et essaya de protéger son corps avec ses bras, mais cela ne suffisait pas. De la main, il explora les environs et comprit qu’il était allongé sur une table. Il se redressa, enroula le drap autour de ses épaules et fit glisser prudemment ses jambes par-dessus bord. Ses pieds nus touchèrent le sol — un ciment glacé comme l’enfer. Il les reposa vivement sur la table qui, en comparaison, lui parut presque chaude.
     Il faisait terriblement froid. Mieux valait ne pas rester trop longtemps assis. Il ne se demandait pas où il se trouvait. C’était clair: en ce moment précis, il était là, et nulle part ailleurs. Mais quel était cet endroit? Une table froide, un drap, un sol cimenté… Quelle avait été sa vie auparavant? Pouvait-il découvrir, dans la succession des événements qui avaient précédé cet instant, un lien de cause à effet qui expliquât sa présence en ce lieu? On ne sait jamais ce qui va suivre notre prochain pas. Et le présent n’en finit pas de nous étonner: voilà donc où j’ai atterri, et dans quel état! Tremblant de froid sur une dalle en ciment!
     Il ne pouvait pas demeurer assis plus longtemps, ni à fortiori réfléchir indéfiniment à la situation. L’humanité ne serait sauvée que par l’action. Il posa à nouveau ses pieds sur le sol. D’une main, il serrait le drap autour de ses épaules, tandis que l’autre tâtonnait dans l’obscurité environnante. Il avançait prudemment en levant bien haut les jambes. Soudain, un mur surgit. Incurvé vers le haut: une voûte. Il vérifia son hypothèse en tâtant sur le côté: oui, il s’agissait bien d’une voûte. La nervure descendait jusqu’au sol. Et plus loin: une autre voûte. Il recula, retrouva péniblement sa table et s’y installa à genoux, ramenant au-dessous de lui ses pieds frigorifiés.
     Sa table. Depuis quand était-elle sienne? Quel lien les unissait? Il y était allongé, c’est vrai, mais l’avait-il lui-même choisie? Sa table: plus chaude que le ciment, presque un foyer. Mais il fallait connaître le monde, voyager. Toutes les grandes découvertes ne s’étaient-elles pas faites dans les ténèbres?
     Il se laissa glisser à terre de l’autre côté. Le ciment à nouveau, de part et d’autre de sa barque. Ses pieds partaient dans tous les sens. Ils n’étaient plus amis et se repoussaient mutuellement. Sa main progressait au hasard dans l’obscurité et rencontra bientôt une autre table, étrangère. Il la palpa avec précaution, puis s’y allongea à plat ventre. Il n’y avait personne, mais il ne voulut pas prendre le risque de s’attarder en un lieu inconnu. Il retourna à son point de départ et se réchauffa les pieds. Il avait déjà exploré deux points cardinaux. Dans l’espace courbe d’une métagalaxie, il aurait pu, en se déplaçant en ligne droite jusqu’à l’infini, revenir à son point de départ, mais dans cette salle toute en ciment c’était apparemment impossible. Aiguillonné par la soif des découvertes et par un espoir sans limites, il se laissa encore une fois glisser pardessus bord et s’en fut prospecter une nouvelle direction.
     Une troisième table. Elle aussi étrangère, froide et déserte. S’il y en avait au moins trois dans la salle, pourquoi était-il allongé sur l’une plutôt que sur une autre? Il était difficile de voir en cela la moindre nécessité.
     Il décida qu’il n’avait rien à perdre et s’aventura à tâtons sur le côté. La quatrième direction, il l’explorerait plus tard, pour garder des espoirs en réserve. Son approche était géométrique: il connaissait la simplicité de l’esprit humain et supposa que si sa table était encadrée par deux autres identiques, celle qu’il venait d’aborder servait aussi de centre à une triade. Il devait donc en rencontrer une autre en diagonale de la sienne.
     Il avança. Au nom de la vérité, il se sentait prêt à se couper de sa table d’origine. Sa modeste hypothèse se révéla un trait de génie: la table existait bien. Il en palpa le bord, le plateau, et soudain: quelque chose, quelqu’un. Sa main eut un sursaut, puis elle poursuivit sa lente progression sur la forme allongée. D’abord un drap, et sous le drap, un être humain. Dieu soit loué, pensa-t-il, attendri, car il avait toujours éprouvé de l’amour pour ses semblables. Surtout lorsqu’ils arrivaient à point nommé pour lui tenir compagnie.
     Mais l’inconnu allongé sur cette île étrangère demeurait absolument immobile. Cela ne le découragea pas: il était tout heureux de sa trouvaille. Quelques instants plus tôt, un drap le recouvrait lui aussi, mais il s’était éveillé à l’action, à la connaissance, et allait à présent ranimer l’humanité entière. Cette idée grandiose lui réchauffait le cœur.
     L’homme pénétra plus avant dans les ténèbres du cosmos. La table suivante était vide, mais une forme reposait sur celle d’après, immobile et recouverte d’un drap. Il retourna jusqu’à la table précédente et partit sur le côté. Une nouvelle table et un corps allongé. Quelle merveilleuse géométrie! Une table occupée était encadrée par quatre tables libres, et réciproquement. Il se réjouissait de découvrir, dans l’obscurité de cette salle voûtée, une organisation si admirable. Il venait d’acquérir un précieux savoir: ainsi se faisaient les grandes découvertes, ainsi s’édifiait la science! Il avait reçu sa part du festin des dieux.
     Mais il avait froid aux jambes et se recroquevilla sur le plateau vide. Il ne désirait plus à tout prix retourner à sa table d’origine, bien qu’elle lui fût plus proche et plus chère que les autres, comme si des fils invisibles la reliaient à son être.
     À présent, il était temps de réfléchir sérieusement, en faisant fi de tous les préjugés. Pourquoi ces personnes étaient-elles allongées, immobiles? S’il en avait déjà découvert trois, il devait logiquement y en avoir d’autres, en nombre infini. Un être doué de raison n’avait donc plus besoin d’explorer à tâtons cette salle obscure. Il tenait une loi de régularité qui répondait à toutes les questions. Maintenant, c’était aux autres de tâtonner, aux autres de chercher, pour la réfuter, des exceptions qui ne confirmaient pas la règle.
     Mais le froid le pénétrait de plus en plus. Il faisait des efforts pour ne pas se laisser aller, ne pas se rendormir avant d’avoir allumé son flambeau pour le bien de l’humanité. Il fallait se libérer des joies de la connaissance et du sentiment de supériorité qu’elle procurait. Il devait assurer son salut et celui des autres.
     Pourquoi étaient-ils allongés, immobiles? Peu à peu, l’orgueil scientifique cédait la place à l’angoisse, la peur, la terreur. Oui, pourquoi restaient-ils couchés sans bouger? Voulaient-ils lui signifier que leur situation à eux était normale, mais non la sienne? Il était seul parmi ces gens inertes, et il n’avait pas même de flambeau pour les sauver et se sauver lui-même, bien qu’il ait été choisi pour les éveiller.
     Il sauta à terre et se rua sur le corps le plus proche. Il le secoua en criant, et ses paroles résonnèrent comme un chuchotement effrayant:
     — Homme, lève-toi, je te l’ordonne!
     L’autre ne réagit pas; il restait allongé, immobile.
     Le son de sa propre voix lui fit peur. Il se précipita jusqu’à la table située en diagonale et empoigna son occupant:
     — Lève-toi, je te l’ordonne !
     Il courut d’une table à l’autre suivant la loi qu’il avait découverte, en secouant un à un les corps immobiles. Il se cognait parfois contre les murs ou les piliers, mais n’y attachait aucune importance. La frayeur étendait sur lui son empire. Il ne sentait plus ses jambes engourdies par le froid. Il se démenait à travers la pièce, d’une nef à l’autre, d’une table à l’autre, en gesticulant et en criant. Sans nul doute, il s’en prit plusieurs fois aux mêmes corps et en oublia certains. Ce n’était plus la loi qui le guidait, mais le désespoir.
     Accablé, il promit, jura, pria, implora. Il n’était pas misanthrope, il appartenait à l’humanité, il avait besoin d’elle, ne pouvait vivre sans elle. Non, impossible de vivre seul dans cette salle voûtée, dans cette obscurité infinie ! 0, désespoir ! Il ne croyait plus en ces formes allongées, mais il restait persuadé que, même si l’humanité se réduisait à elles, il devait trouver un secours dans cette abstraction vide, dans cette radieuse entité, omnipotente et universelle. Il appela de toutes ses forces:
     — Hommes, où êtes-vous?
     L’écho le singea à plusieurs reprises:
     — Êtes-vous-ou-ou-ou…
     Il tendit l’oreille, puis beugla d’une voix plus terrible encore:
     — Humanité! Écoute-moi! Je suis ton fils, je suis perdu. Aide-moi!
     Mais le froid et la peur resserraient sur lui leur étreinte de fer et il eut juste la force d’ajouter en sanglotant:
     — Je t’aime!
     Soudain, la salle s’éclaira. Il plissa les yeux. Cette faible lumière, qui provenait d’une ampoule nue située près de l’entrée, lui paraissait excessivement vive après ce long séjour dans l’obscurité. Lorsqu’il se fut accoutumé, il aperçut, dans l’encadrement de la porte, un petit vieillard chétif vêtu d’une pelisse.
     Le vieux rugit:
     — Tu n’as pas un peu fini de crier comme ça ! Retourne à ta place!
     Ce vieillard aussi lui signifiait que sa table était l’île où il devait vivre. Il avait froid aux pieds, et il aurait été plus sage en effet de retourner s’y asseoir pour discuter des mystères de ce monde avec ce vieux qui se déplaçait sans aide. Ce faisant, pourtant, il exécuterait un ordre, et cela ne lui plaisait guère, car il ne savait pas qui était son interlocuteur, ni s’il avait le droit de lui donner ainsi des ordres. Il l’interrogea donc:
     — Qui es-tu pour me commander cela?
     — Je suis le gardien et vous devez tous m’obéir, répondit le vieillard sur un ton presque paternel.
     — Nous? Mais qui sommes-nous au juste? demanda-t-il avec malice en se balançant d’un pied sur l’autre.
     Le vieillard ne s’étonna pas de cette question. Il répondit très gravement, d’une voix où perçait la lassitude:
     — Vous êtes des morts; c’est pourquoi vous devez rester couchés en silence.
     Des morts? Avant que cette idée n’atteigne sa conscience, une nouvelle question surgit dans son esprit:
     — Et si nous refusons d’obéir?
     — On trouvera des moyens pour vous y obliger, menaça le gardien.
     Morts? Comment cela, morts? Il ne parvenait toujours pas à l’admettre, sinon peut-être de manière fragmentaire: cela s’appliquait aux autres, mais pas à lui.
     — Alors, qu’attends-tu pour faire ton signe de croix? lança-t-il pour taquiner le vieil homme. Ses pieds étaient gelés et il aurait mieux valu être assis sur le coin de sa table, mais son désir de tenir tête au vieillard était plus fort que le froid.
     — Aujourd’hui, on dispose d’autres moyens, répondit posément le vieux, sur un ton chargé de mystère.
     Morts? En effet, ils demeuraient allongés, sans bouger. Ni les secousses ni les cris ne les avaient éveillés. Peut-être étaient-ils vraiment?…
     Mais lui? Il ne pouvait pas être mort puisqu’il était parti à la recherche d’un flambeau! Non, on lui mentait! Ce vieillard était peut-être le plus honnête et le plus sage du monde, mais là, il mentait!
     — Je ne suis pas mort! hurla-t-il.
     Le vieux eut un geste désabusé et ne prit même pas la peine de répondre.
     — Comment pourrais-je être mort alors que je bouge et que je parle? reprit-il pour tenter de se défendre. Il regarda les corps allongés recouverts par les draps blancs, puis se considéra lui-même, enveloppé dans un drap semblable aux autres. Il eut alors le sentiment qu’il était peut-être bien coupable de quelque chose et qu’il devait à présent se justifier, ce qui était loin d’être facile.
     Le vieillard répéta son geste.
     — Ça, c’est ce que vous dites tous.
     Tous? Il examina la salle. C’était une morgue semée de colonnes, vaste sous-sol au plafond voûté. Sous chaque voûte se trouvait une grande table, et sur la moitié des tables, des corps masqués par des draps reposaient, disposés en damier. S’il fallait en croire le gardien, d’autres avaient déjà essayé de prouver qu’ils n’étaient pas morts, mais on ne les avait pas écoutés. Comment expliquer sinon cette indifférence et cette tranquillité?
     Dans son cœur s’insinua une crainte nouvelle: si lui non plus n’arrivait pas à prouver qu’il n’était pas mort? Il cria:
     — J’ai été amené ici par erreur!
     — Ho, ho! Tiens donc! Par erreur? s’esclaffa le vieillard. Il prit une feuille dans le tiroir d’un bureau situé près de la porte, chaussa ses lunettes et éleva le document vers la lumière de l’ampoule.
     — Table numéro quatorze. Nom: inconnu. Tu vois, tu n’as même pas de nom!
     — Comment cela? Je m’appelle… L’autre l’interrompit avec de grands gestes de la main:
     — Va au diable avec ton nom! Je n’ai pas besoin de le connaître. Remonte sur la table numéro quatorze. Il se trouvera bien des gens assez intelligents pour découvrir comment tu t’appelles.
     — Je n’irai nulle part, je ne suis pas mort, protesta-t-il en avançant vers le vieillard. Le document était quelque chose de sûr. Le gardien y croyait, il y croyait aussi: il voulait le voir.
     Le vieux reculait, mais il lui arracha le papier des mains et lut: « Trouvé mort sur un trottoir dans le quartier de la gare. » Le décès était confirmé par la signature d’un médecin.
     — Demain matin, on t’emmène pour l’autopsie! lança le vieillard avec une joie méchante.
     Dans le quartier de la gare? Cela avait toutes les apparences de la réalité. C’était terriblement vivant, presque palpable, un événement inscrit dans l’espace et dans le temps.
     — Quand m’a-t-on découvert? demanda-t-il.
     — Hier, tard dans la soirée; tu vois bien que la date est indiquée sur le papier ! répondit l’autre de mauvaise grâce.
     C’était la nuit et on l’avait découvert le soir. Il n’était donc ici, dans cette morgue, que depuis peu, et non de toute éternité. Maintenant, il se trouvait dans le présent, dans la réalité de l’instant.
     Lorsqu’il se fut convaincu de cela, il remit en marche sa logique concrète et quotidienne. Le quartier de la gare, le restaurant de la gare, une migraine, des propos savants, la nausée, l’humanité, un état de trouble, la morgue, la table numéro quatorze, le gardien.
     — J’étais ivre et l’on m’a pris pour un mort! s’écria-t-il brusquement, à la fois réjoui et vexé.
     Mais l’autre ne se laissa pas ébranler par cette explication ingénieuse. Il désigna le document de son doigt osseux et dit avec calme:
     — Ivre ? Tu parles ! On t’a emmené, on t’a lavé, on t’a habillé, tu n’as pas prononcé un seul mot, et à présent tu veux faire croire que tu étais ivre! Ce papier a été signé par un médecin qui a fait des études, il le sait mieux que toi, si tu étais ivre ou mort. Allez! Retourne sur ta table!
     Devant tant d’assurance, il prit peur. Il agita le document et gémit plus plaintivement qu’il n’était nécessaire:
     — Je leur prouverai que j’étais ivre!
     Le vieillard adopta soudain un ton nouveau et inattendu:
     — Écoute bien ce que je vais te dire. Je suis gardien ici depuis dix-huit ans, et j’ai déjà vu des morts autrement plus malins que toi, mais aucun d’eux n’a jamais pu échapper à la science.
     Il s’effrayait de plus en plus. Le vieux le prenait pour un revenant. Mais les précédents? Peut-être étaient-ils vraiment vivants, eux aussi? Était-il possible que des vivants soient?… Certes, il était coupable d’avoir bu, de s’être enivré au point de ressembler à un cadavre, mais devait-on pour autant le conduire aussitôt à l’autopsie ? La réalité lui revint soudain à l’esprit: la journée précédente, son travail, sa famille, la ville, la neige, les passant pressés, la musique des transistors, les nuages. Et par contraste avec ces souvenirs, l’endroit où il se trouvait devint une vision effrayante, lointaine et repoussante. Il eut peur qu’on essaye de le retenir par la force, pour lui faire expier ses péchés ou ceux du monde.
     — Laisse-moi partir! cria-t-il.
     — Je ne peux pas, dit le vieillard en écartant les bras. Au matin, on verra qu’il manque une tête. Il y aura le papier, mais pas le mort. On me demandera où je t’ai mis, et qu’est-ce que je pourrai dire? Personne ne me croira. On me soupçonnera de je ne sais quoi, d’autant plus que les circonstances de ta mort sont plutôt obscures. On doit déjà être en train de rechercher tes meurtriers.
     — Mais je vais mourir de froid, ici ! se plaignit-il en frissonnant.
     Pour la première fois, le gardien l’observa très attentivement, et ses certitudes paraissaient un peu ébranlées.
     — Je peux te donner quelques hardes et un flambeau, concéda-t-il avec une réticence extrême, en ayant le sentiment de faire quelque chose d’exceptionnel qui allait à l’encontre de lois bien établies.
     Le vieillard sortit. Il jeta un regard circulaire sur la chambre mortuaire. Maintenant qu’il avait rejoint la réalité, il se revit en train de palper les tables dans le noir, de secouer les morts, de se démener sous les voûtes, et une peur démente l’envahit. Il ne pouvait demeurer une minute de plus dans cette salle. Ces pauvres morts tranquilles, ces draps chiffonnés, lui, ivrogne repoussant, seul, perdu. Non, non! Sortir d’ici, vite!
     Il se précipita derrière le vieux, prit sur la couche de celui-ci une loque usée qu’il jeta sur ses épaules, lui arracha le flambeau des mains et monta à grandes enjambées l’escalier qui débouchait dans la cour de l’hôpital. Puis il franchit le portail et s’élança dans la ville. Il courait pieds nus dans la neige, par les rues et les places, sous les arbres couverts de givre argenté. Son drap et les pans de sa guenille flottaient dans le vent. Il traversait la ville figée par l’hiver, portant haut le flambeau de l’humanité.
     Le gardien était resté sur le seuil. Il aurait dû le retenir, le poursuivre.
     La cité endormie était silencieuse. Le porteur de flambeau laissait dans la neige les empreintes de ses pieds nus.
     « Ils suivront ses traces… dix-huit ans de service… soyez donc gentils avec les morts… » murmurait le vieillard en regardant, triste et indifférent, la lueur du flambeau qui s’éloignait.

Traduit de l’estonien par Antoine Chalvin