Poèmes (bilingues)

Traduits de l’estonien par Antoine Chalvin
 

LÕPP JA ALGUS

Kas tunnete : väriseb maa !
Kas kuulete : kisendab veri !
Nüüd tuleb kas ei või jaa !
Nüüd on kallastest tõusnud meri.
        Olge valmis !

Me seisame kahe riigi väraval :
see üks on pimedus ja teine valgus.
Me, noored, ootame pilgul säraval :
nüüd see ligineb : lõpp ja algus !
        Viimaks ometi !

LA FIN ET LE COMMENCEMENT

Le sentez-vous : la terre tremble !
Entendez-vous : le sang rugit !
Maintenant, c’est oui ou non !
La mer déjà couvre les côtes.
        Tenez-vous prêts !

Nous sommes là, aux portes de deux mondes :
l’un est l’obscurité et l’autre la lumière.
Jeunes gens aux yeux brillants, nous attendons :
et cela vient : la fin et le commencement !
         Il était temps !


OMA SAAR

Ma sõuan merel ja sõuan,
    üht saart mina otsin sääl.
Seda kaua ju otsinud olen
    laia lageda mere pääl.

Mõnd saart on määratus meres,
    mõnd sadamat vilusat.
Oma saart aga mina ei leia,
    oma unistust ilusat.

Ma sõuan merel — ja hõljun
    ja lained hõljuvad ka,
kõrgel kiiguvad, liiguvad pilved —
    oma saart aga otsin ma.

MON ÎLE

Je rame et rame sur la mer,
        à la recherche d’une île.
Voici déjà longtemps que je l’espère
        sur les flots vastes et tranquilles.

Il y a sur l’onde infinie
        bien des îles et des ports.
Mais mon bel îlot, mon si joli rêve,
        je ne l’ai point trouvé encor.

Je rame et roule sur la mer,
        comme moi roulent les flots,
très haut dans le ciel ondoient les nuages —
        toujours je cherche mon îlot.


NOORUSE AEG

Aeg antud naerda, aeg antud nutta,
aeg antud pisaraid pühkida.
Aeg seatud elada, aeg seatud surra,
aeg musta mulla all magada.

Kuid mis on nooruse aeg ?

Ei ole see paastuda, ei ole see paluda,
ei vaimu närides närtsida :
see aeg on õitseda, aeg õnne maitseda —
ja armsa kaela ümber hakata.

LE TEMPS DE LA JEUNESSE

Il y a le temps de rire et celui de pleurer,
le temps pour essuyer ses larmes.
Le temps fixé pour vivre et pour mourir,
et le temps pour dormir sous la terre noire.

Mais quel est le temps de la jeunesse ?

Ce n’est pas celui de jeûner ni de supplier,
ni de se faner en se fatiguant l’âme :
c’est le temps de fleurir, de goûter le bonheur —
et de s’accrocher au cou d’un être aimé.


JUHIS

Kellele antud on paista kui päikene,
paistku siis päiksena üle maa !
Kellele kästud on lüüa kui äikene,
löögu see valjult ja armuta !

DIRECTIVE

Celui dont le lot est de briller comme un soleil,
qu’il brille sur le monde entier !
Celui dont le devoir est de frapper comme la foudre,
qu’il frappe fort et sans pitié !


KEVAD JA SÜGIS

Sina oled kevade mureta laps —
kevad ise sa oled.
Mina olen tumeda sügise poeg —
sügis ise ma olen.

Kuid mina ihkan kevade järele.
Sirutan vastu sull’ käed.
Kevad ! — ei ära sa põgenegi,
vaid minu hõlma sa vaod.
Kevad ja sügis — suudelgem :
suvi me suudlustest sünnib.

LE PRINTEMPS ET L’AUTOMNE

Tu es l’enfant insouciante du printemps —
le printemps même.
Je suis le fils du ténébreux automne —
l’automne même.

Mais je désire le printemps.
Je tends les mains vers toi,
printemps ! — et tu ne t’enfuis pas,
tu tombes dans mes bras.
Printemps et automne — embrassons-nous :
de nos baisers naîtra l’été.


SÜGISE LAUL

Hall on taevas ja must on maa.
Sajab ja sajab lõpmata.

Udusse upuvad sihid kõik eel,
haige on süda ja väsinud meel.

Ah, kui nii palju, ni palju ei sajaks,
tuul selle udu kord laiali ajaks!

Ilm aga sumestub hääletu.
Sügisepäev jõuab õhtule ju.

Kuhu küll lõpeb rändaja tee?
Öö tuleb, pime ja pilkane.

Ah, kui nüüd taevatähtigi oleks,
kui veel see öögi nii otsatu poleks?

CHANSON D’AUTOMNE

La terre est noire et le ciel gris.
Il pleut, il pleut à l’infini.

La brume noie mes volontés.
Cœur malade, esprit hébété.

Ah si la pluie pouvait cesser !
la brume au vent se disperser !

Mais le temps se couvre en silence.
Le jour prend fin, le soir s’avance.

Où donc finira le chemin ?
Noire et profonde, la nuit vient.

S’il y avait au moins une étoile qui luit !
Si encore on voyait le bout de cette nuit !